Spectre visible d’une gemme : spectro vs. Gospectro

29 janvier 2020

par Marie-Sophie de Maissin, gemmologue

Qu’est-ce que le spectre d’une gemme ?

Le spectre permet l’identification d’une gemme grâce à sa réaction à la lumière. En effet, tout objet absorbe une partie de la lumière visible et en réfléchit (ou en renvoie) une autre partie ce qui explique que l’on puisse voir ces objets et que l’on puisse les voir de différentes couleurs.

Le spectre de référence, celui que l’on va utiliser est le spectre de la lumière visible, mais plus précisément le spectre de la lumière du jour qui comprend l’ensemble des couleurs du spectre – les couleurs de l’arc en ciel. A chaque couleur correspond une longueur d’onde.

 

En gemmologie, nous utilisons la spectroscopie. Il y a 2 modèles de spectroscopes utilisé en gemmologie, le spectroscope à réseau et le spectroscope à prisme. Mes confrères gemmologues seront d’accord pour convenir que le spectroscope à prisme est le plus communément utilisé.

Spectroscope à prisme


Spectroscope à réseau

L’utilisation du spectroscope n’est pas toujours facile, il faut :

  • La bonne lumière, (lumière jaune ou lumière du jour, les lumières à LED ont un spectre spécifique)
  • La bonne exposition,
  • La bonne orientation,
  • La bonne visée (le spectre que j’observe est-il réellement celui de la pierre)
  • Et j’en passe…

L’appareil est petit, malcommode, on ne voit pas bien. Bref, c’est un peu rebutant pourtant la lecture des spectres peut aider à départager 2 gemmes.

Un bon gemmologue se doit d’être un peu geek. L’ère du numérique aidant on veut de l’instantané qui dure, on veut des preuves.

Une appli pour smartphones : GoSpectro

Des chercheurs du centre technologique ALPhANOV se sont penchés sur la question et ont eu l’idée géniale de créer une appli pour les smartphones.

Ces chercheurs ont fait une application reliant le spectroscope au téléphone portable, rendant ainsi la lecture des spectres plus lisible, plus facile, plus pratique, plus rapide et enfin la lecture des spectres peut se faire sans stress et… en groupe, car il s’affiche directement sur l’écran du smartphone. Il peut être ensuite sauvegardé et partagé par MMS comme n’importe quelle photo du téléphone.

Spectroscopie au GoSpectro

Pour les puristes, s’affiche à l’écran non seulement le spectre avec les couleurs visibles, mais également le graphique avec les pics d’émission et les bandes d’absorption. Lequel, tout comme le spectre en couleur peut être sauvegardé et partagé.

On peut alors réellement parler d’une révolution dans la spectroscopie. Voici l’association spectroscope-smartphone : le GoSpectro

Figure 1 – Photo du GoSpectro, spectromètre ultra compact pour smartphone

Figure 1 – GoSpectro, spectromètre ultra compact pour smartphone

Fluorescence au GoSpectro

Les capacités du GoSpectro ne se limitent pas à capter les spectres et les transformer en graphique. Il peut être également utilisé pour mesurer la fluorescence d’une gemme, laquelle est parfois présente dans certaines gemmes synthétiques alors que la version naturelle de cette même gemme ne fluoresce pas. C’est le cas du spinelle. Tous les deux étant de couleur identique à l’œil et donc au spectroscope, mais ayant des composés chimiques différents qui vont être révélés par la fluorescence. Ce phénomène de fluorescence est dû, notamment, à la présence de fer dans le spinelle naturel.

Figure 7 – Photographie de spinelle synthétique et de spinelle naturel sous lampe UV

Figure 2 – Photographie de spinelle synthétique et de spinelle naturel sous lampe UV

Spectre de fluorescence du spinelle naturel vs. Spinelle synthétique

Le spectre de fluorescence a été enregistré en excitant la gemme à l’aide d’un pointeur laser du commerce émettant à 405 nm. Le même protocole a été opéré dans le cas du spinelle synthétique et du spinelle naturel. Pourtant seul le spinelle synthétique présente un spectre de fluorescence visible au spectromètre. Il s’agit d’une large bande d’émission allant de 500 nm 650 nm. Le spinelle naturel montre uniquement la raie d’émission du laser à 405 nm qui émane de la gemme dû au phénomène de diffusion élastique.

Cela constitue une solution intéressante et offrant une grande portabilité pour mesurer dans les gemmes la fluorescence des ions présents, générée à l’aide d’un simple pointeur laser fonctionnant sur pile. Il est à noter que, par comparaison avec un spectroscope classique (prisme ou réseau) à visée oculaire, le spectre est ici mesuré par le capteur photo du smartphone, plutôt que l’œil du gemmologue. Cela réduit considérablement les risques liés à la sécurité oculaire auxquels l’utilisateur s’expose en utilisant un laser.

Figure 8 – Spectres de fluorescence du spinelle synthétique et de spinelle naturel excités par un pointeur laser à 405 nm

Figure 3 – Spectres de fluorescence du spinelle synthétique et du spinelle naturel excités par un pointeur laser à 405 nm

Pour conclure

Le GoSpectro est plus qu’un gadget numérique il permet d’affiner sans fatigue pour l’œil des observations minutieuses tant en spectrométrie qu’en fluorescence et ce simplement et en toute objectivité puisque les données ainsi relevées sont enregistrées directement dans la mémoire du téléphone et peuvent par la suite être partagées. De plus, de par son encombrement minimal et sa simplicité d’utilisation en comparaison aux matériels de laboratoire, il peut être emporté aisément et devenir un outil fiable de terrain. Son coût abordable en fait un appareil qui deviendra vite indispensable pour tout gemmologue.

En bref,

On a adoré

  • sa simplicité d’utilisation,
  • sa portabilité
  • sa convivialité
  • la possibilité de sauvegarder les spectres et de pouvoir les partager
  • le service après-vente

On a moins aimé

  • l’interface en anglais (mais elle va être traduite prochainement)
  • la difficulté de calibrage au démarrage (mais avec le temps et de l’entraînement, c’est plus facile).